Canal du Nivernais
L’écluse de Cravant ou le romantisme de l’abandonL’échelle d’écluses de SardyLa forge du site d’écluse 06 du versant SeineLes maisons du bief de partage du canal du NivernaisLes maisons éclusières du Batardeau à Auxerre, bief 81 du versant YonneDes ponts de desserte locale, les exemples des ponts du moulin de Cray et du château de RocheLe port de La Copine à Champvert

Ponts et passerelles

Les ouvrages de franchissement sur le canal du Nivernais

« Pont de Châtillon, achevé en 1790 ». Planche Xe de la « Description du canal du Nivernais tel qu'il a été projeté pour la navigation du Bois, suivie d'un projet économique pour son extension tendant à la faire servir au commerce en général ». Par le Sieur Hageau, Ingénieur en second dudit canal. 1790. Archives départementales de la Nièvre, 1 J 106.
« Pont de Châtillon, achevé en 1790 ». Planche Xe de la « Description du canal du Nivernais tel qu'il a été projeté pour la navigation du Bois, suivie d'un projet économique pour son extension tendant à la faire servir au commerce en général ». Par le Sieur Hageau, Ingénieur en second dudit canal. 1790. Archives départementales de la Nièvre, 1 J 106.

Les ponts fixes

Bien qu’ils soient projetés pour être construits en pierre sous l’Ancien Régime, la majorité des ponts du canal du Nivernais furent construits en charpente dans les années 1830. Plusieurs procès-verbaux d’adjudication, conservés aux Archives départementales de la Nièvre, le confirment : « la plupart des ponts en maçonnerie furent d’abord établis en charpente mais ils se dégradaient rapidement »1. D’après le projet de l’ingénieur ordinaire Poirée, approuvé en 1825, les ponts, au nombre de 33, situés sur la partie du canal reliant La Chaise à Coulanges-sur-Yonne, présentaient quatre mètres de largeur de voie et étaient composés d’un tablier en charpente, de deux culées en maçonnerie et de garde-corps en bois7.

Pont routier isolé de Martigny, composé de culées et d'une voûte en moellon et pierre de taille. Sur le bief 30 du versant Loire à Cercy-la-Tour, il permet une desserte locale.
Pont routier isolé de Martigny, composé de culées et d'une voûte en moellon et pierre de taille. Sur le bief 30 du versant Loire à Cercy-la-Tour, il permet une desserte locale.
Plan, coupe et élévation ; « Dessin des ponts isolés en maçonnerie et charpente construits dans la partie comprise entre Lachaise et Coulanges ». Archives départementales de la Nièvre, 60 J 4.
Plan, coupe et élévation ; « Dessin des ponts isolés en maçonnerie et charpente construits dans la partie comprise entre Lachaise et Coulanges ». Archives départementales de la Nièvre, 60 J 4.
Plan, coupe et élévation du « Pont à construire sur le canal à la Rencontre de la Route Royale n°79 de Paris à Genève ». 1827. VNF-direction territoriale Centre-Bourgogne, subdivision de Corbigny.
Plan, coupe et élévation du « Pont à construire sur le canal à la Rencontre de la Route Royale n°79 de Paris à Genève ». 1827. VNF-direction territoriale Centre-Bourgogne, subdivision de Corbigny.

Seuls les ponts situés autour du bief de partage furent réalisés entièrement en maçonnerie au début du 19e siècle : les ponts des Poujeats, des Breuilles et de Port-Brûlé, situés sur la commune de La Collancelle, ont ainsi été construits dans les années 1820, en moellon et en pierre de taille.

Le pont des Breuilles, composé de trois arches en anse de panier. Les culées, les voûtes et les parapets sont en moellon et en pierre de taille. Il permet une desserte locale au niveau du bief de partage à La Collancelle.
Le pont des Breuilles, composé de trois arches en anse de panier. Les culées, les voûtes et les parapets sont en moellon et en pierre de taille. Il permet une desserte locale au niveau du bief de partage à La Collancelle.
Plan, coupe et élévation du « Pont à construire sur la grande tranchée en face des Breuilles ». Daté du 18 avril 1836 et signé Charié. Archives départementales de la Nièvre, 60 J 4.
Plan, coupe et élévation du « Pont à construire sur la grande tranchée en face des Breuilles ». Daté du 18 avril 1836 et signé Charié. Archives départementales de la Nièvre, 60 J 4.
Pont routier de Port-Brûlé permettant une desserte locale. Les culées, la voûte et les parapets sont en moellon et en pierre de taille. Bief de partage à La Collancelle.
Pont routier de Port-Brûlé permettant une desserte locale. Les culées, la voûte et les parapets sont en moellon et en pierre de taille. Bief de partage à La Collancelle.

Progressivement, les ingénieurs se rendirent compte que les ponts en charpente n’étaient pas assez solides et qu’ils se dégradaient rapidement. Dès les années 1840, des campagnes de travaux furent conduites pour remplacer les tabliers en charpente des ponts du canal par des voûtes en pierre ou en brique. Cette situation est exposée, par exemple, dans un rapport sur le projet de transformation du pont de Pousseaux, le 18 mars 1847, par l’ingénieur ordinaire Cambuzat8. Le pont est en mauvais état : « il y a nécessité de remplacer le tablier en bois par une voûte en pierre, et pour donner le plus de largeur possible à la voix charretière et plus de sécurité aux piétons il est aussi nécessaire de placer en tête du pont des garde-corps en fer au lieu de parapets en pierre. On aura ainsi une voie de 4m de largeur pour les voitures et des trottoirs de 0m90 ».

Pont sur l’écluse 13 du versant Loire dite de Mingot à Châtillon-en-Bazois.

Le pont sur l’écluse de Mingot fait aussi l’objet des mêmes préoccupations9 : « Le pont dont il s’agit a été construit en 1827 avec tablier en bois lors de la construction du canal. A cette époque il ne donnait passage qu’à un simple chemin rural. Depuis lors cette voie a été convertie en un chemin vicinal de moyenne communication. […] En vertu d’une décision ministérielle du 25 novembre 1862, le tablier en bois a été remplacé par une voûte en maçonnerie avec deux trottoirs et garde-corps de fer. » Aujourd’hui, on dénombre 41 ponts fixes voûtés en pierre ou en brique sur le canal.

A partir des années 1870, les charpentes des ponts sont remplacées par des poutres en métal. Ainsi, 21 ponts fixes en charpente, situés entre Coulanges et Decize, furent transformés et exhaussés en 1876. Les poutres en bois furent notamment remplacées par des poutres en fer. Ce fut le cas de la charpente du pont Gravelot, élevé sur les plans de l’ingénieur Poirée dans les années 1830. Aujourd’hui, on compte 68 ponts fixes dont les culées sont construites en pierre, et le tablier est en métal et en bois.

Tablier en bois et garde-corps en métal du pont sur l'écluse 44 du versant Seine, dite de Chantenot à Chevroches.
Tablier en bois et garde-corps en métal du pont sur l'écluse 44 du versant Seine, dite de Chantenot à Chevroches.
Le pont sur l'écluse 54, dite de Bèze à Lucy-sur-Yonne. On voit nettement le rehaussement.
Le pont sur l'écluse 54, dite de Bèze à Lucy-sur-Yonne. On voit nettement le rehaussement.

A partir du 20e siècle, les ponts permettant le franchissement d’axes de communication importants, furent restaurés ou reconstruits pour certains, en béton. Aujourd’hui 39 ponts fixes ont été reconstruits entièrement ou en partie en béton. C’est le cas du pont situé juste en aval de la tranchée de la Chaise et permettant le passage de la D 146. Il est construit en béton recouvert d'un enduit imitant la pierre de taille.

Le pont en béton de Saint-Thibault, à Saint-Léger-des-Vignes, bief 35 du versant Loire.
Le pont en béton de Saint-Thibault, à Saint-Léger-des-Vignes, bief 35 du versant Loire.

Cette typologie de ponts fixes est assez exceptionnelle à l’échelle de notre étude sur les canaux de Bourgogne. En effet, dans les années 1870-1880, lors de la mise au gabarit Freycinet du canal du Centre et de celui de Bourgogne, l’ensemble de leurs ouvrages de franchissement furent exhaussés et reconstruits afin de faire passer des péniches de plus grand tonnage. Les tabliers des ponts fixes furent notamment repris en métal. Le canal du Nivernais n’a pas connu cette modernisation majeure de la navigation commerciale. La plupart de ses ponts, construits en maçonnerie, servaient pour la desserte locale : ils n’avaient donc pas besoin d’être reconstruits en métal. Ces ponts nous livrent ainsi une vision des ouvrages du canal avant l’ère industrielle et commerciale.

Pont de Cuncy donnant accès au château du même nom. Bief 44 du versant Seine à Villiers-sur-Yonne.
Pont de Cuncy donnant accès au château du même nom. Bief 44 du versant Seine à Villiers-sur-Yonne.
Le pont avec sa voûte en brique sur l’écluse 01 de l’embranchement de Vermenton, à Accolay.
Le pont avec sa voûte en brique sur l’écluse 01 de l’embranchement de Vermenton, à Accolay.

Les ponts mobiles

Le canal du Nivernais se distingue également des autres canaux de Bourgogne par la présence de ponts mobiles. La plupart furent mis en place dès la reprise des travaux de construction du canal dans les années 1830. Pour l’ingénieur Fourrey, « les ponts mobiles sur les canaux correspondent aux passages à niveau sur les chemins de fer. Ils sont gênants pour la circulation par terre et par eau qu’ils interrompent par moment ; en revanche, ils n’exigent pas de modifications au profil en long des voies terrestres. On est donc conduit à les employer lorsque la circulation n’est pas trop active, dans le cas où l’on ne peut établir de rampes d’accès »10. Économie de construction et usage modéré dictent donc l’établissement de ces ouvrages sur le canal du Nivernais. Les projets établis pour le canal dans les années 1820 nous apprennent que la construction de nombreux ponts mobiles en charpente était prévue. Trop fragiles, la plupart d’entre eux furent reconstruits en métal au cours du 19e siècle ; d’autres furent transformés en ponts fixes et élevés en pierre. Treize ponts mobiles ont été recensés sur le canal du Nivernais.

Pont-levis à flèches, dit du Marais à Dirol, sur le bief 35 du versant Seine.
Pont-levis à flèches, dit du Marais à Dirol, sur le bief 35 du versant Seine.

Parmi ces derniers, on distingue aujourd’hui une dizaine de ponts-levants à flèche. Il s’agit du type de pont-levant le plus couramment établi sur les canaux du nord et de l’est de la France au 19e siècle. Ces ponts se composent de :

  • deux montants verticaux fixés à une culée en maçonnerie,
  • d’une « flèche » constituée par deux poutres rendues solidaires par des entretoises et mobiles,
  • d’un tablier relié à la flèche par deux tiges de suspension
  • et d’une chaîne de manœuvre fixée à l’autre extrémité de la flèche.
« Projet de réfection du pont-levis dit de l’Ane au P.K.99.180 ». Dessin daté de 1926. VNF-direction territoriale Centre-Bourgogne ; Subdivision de Corbigny.
Pont-levis à flèches de Pousseaux, sur le bief 52 du versant Seine.
Pont-levis à flèches de Pousseaux, sur le bief 52 du versant Seine.

Pour relever le pont, il suffit d’actionner la chaîne de manœuvre permettant l’oscillation de la flèche, et par là, le levage du tablier. La plupart de ces ponts à flèche ont été établis en charpente dès les années 1830. Ils furent remplacés par des superstructures en métal dès la fin du 19e siècle. Ce fut le cas des ponts-levants de Germigny, de Chazelles, du Marais, de Saint-Didier, de l’Âne, de Pousseaux et de Curiot. Seul le pont-levant à flèche de Thoury, à Dirol, présente encore une structure en charpente ; il a par ailleurs été restauré et remonté à son emplacement sur le canal en 2013. Le pont-levant du Tremblay, desservant le château du même nom sur la commune d’Isenay, est aussi construit en bois mais il ne présente pas de flèche.

Avant Après
Pont-levant de Thoury à Dirol, bief 35 du versant Seine.
Baissé Levé
Pont-levis de Thoury à Dirol en 1992.
Pont-levis de Thoury à Dirol en 1992.
Pont-levis de Thoury à Dirol en 1992.
Pont-levis de Thoury à Dirol en 1992.
Dirol (Nièvre) – Vue générale aérienne. Vers 1950. Négatif au gélatino-bromure d’argent sur plastique. Coll. Combier - musée Nicéphore Niépce – Chalon sur Saône - inv. n° 1975.19.58098.1.1
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Retour au texte 1 Cit. in LANOIZELE Estelle, Le canal du Nivernais dans la traversée du département de la Nièvre, de 1790 à 1855, Mémoire de maîtrise : histoire, Université de Bourgogne, Dijon, 1995.
Retour au texte 2 Archives nationales, F14 6984.
Retour au texte 3 Archives nationales, F14 6986.
Retour au texte 4 « Lettre du directeur général des Ponts et Chaussées au préfet de la Nièvre, le 14 décembre 1864 », Archives nationales, F14 6987.
Retour au texte 5 FOURREY Emile, Notions de navigation intérieure, Paris : École spéciale des Travaux publics, 1941 (10e édition).